L’alcool à Fès: Les calculs politiques de Chabat

Publié le par Foire2Fès

Hamid Chabat
· Un élu en clinique… mais Chabat nie la bagarre
· Le maire veut séduire les électeurs du PJD…
· … et contre le PAM
Que vaut vraiment la dernière sortie du maire de Fès sur l’interdiction de l’alcool dans sa ville? Mieux encore, décréter aujourd’hui Fès «ville sainte» à l’instar de La Mecque et Al Qods est pour le moins surprenant. Qu’est-ce qui justifie cette agitation politique?
Calculs électoraux, effets d’annonce, sortie populiste, précampagne, stratagème partisan… En tout cas, les interprétations vont bon train et animent les conversations de cafés, salons et même les états-majors de partis politiques.
Les déclarations provocatrices du maire suscitent déjà une vive polémique (voir article ci-dessous). Certains y voient l’ambition du parti de l’Istiqlal de courtiser les ennemis d’hier, les islamistes du PJD, pour contrer l’offensive du PAM (Parti de l’Authenticité et de la Modernité de Fouad Ali Al Himma). La formation du tracteur, rappelons-le, presse de tout son poids dans la capitale spirituelle qui est un bastion de l’Istiqlal. Le PAM recrute même plusieurs istiqlaliens de souche. Les sorties virulentes des conseillers du PAM contre le président du Conseil régional ne passent pas inaperçues.
Lahcen Daoudi, député et membre dirigeant du PJD, qui voulait «dé-Chabatiser Fès» lors des législatives de 2007, estime que «la sortie de Chabat est bien calculée». Quant à la réaction de son parti à la déclaration du maire sur l’interdiction de l’alcool, Daoudi souligne: «Si Chabat va dans ce sens, l’on ne peut que l’encourager. Et si on peut faire quelque chose, on est prêt…». Mais encore faut-il que les déclarations de Chabat soient suivies d’actes concrets, tient à préciser le numéro 3 du PJD. Daoudi sait bien que les attributions du maire ne l’autorisent pas à fermer les bistrots. Une prérogative qui relève du ministère de l’Intérieur via son représentant qu’est le wali.
Daoudi sait aussi que le maire a le droit de verrouiller ce type de commerces sous couvert des horaires d’ouverture et de fermeture ou en prélevant des taxes. Ce qui n’est pas rien.
Des observateurs disent que Chabat vise des membres du PAM, lesquels seraient propriétaires d’hôtels, de maisons d’hôte et de bars à Fès.
Autre décryptage et non des moindres, celui du politologue Mohamed Darif. Selon le chercheur, «Chabat nous a habitué aux provocations». Darif précise que le maire «veut renforcer son capital symbolique et provoquer le PAM et le PJD». Mais cela n’engage en rien le Parti de l’Istiqlal, tient-il à préciser.
C’est plutôt «une sortie individuelle isolée et calculée qui sert les propres intérêts du maire. Mais en quoi le PJD devra-t-il se sentir visé? Aux yeux du politologue, c’est l’esprit de la chanson: «Je t’aime, moi non plus». «Cette déclaration qui puise son fondement d’un référentiel conservateur et religieux veut retirer l’exclusivité religieuse au PJD». Autrement dit, poursuit le chercheur, «Chabat est en train d’empiéter sur le territoire des islamistes». Ce qui aura sans doute un écho favorable auprès d’un important électorat islamiste. En revanche, poursuit Darif, Chabat n’a pas besoin de faire des alliances pour remporter des élections. En témoignent les dernières communales, qui lui ont valu la majorité absolue sans pactiser avec qui que ce soit.


Foire d’empoigne au Conseil communal!


Hier matin, à peine enclenchée, la session du Conseil communal de Fès a vite tourné à une foire d’empoigne. Lors de la lecture des comptes administratifs, le conseiller PAM Hassan Taiqui a voulu intervenir pour critiquer l’ordre du jour du maire Chabat. Justement, l’ordre du jour comprend les comptes administratifs ainsi que les 31 projets de décision dont la fermeture des bars et de boîtes de nuit et l’interdiction de la consommation d’alcool… Lors de la lecture des projets, le conseiller du PAM, également membre du cabinet de Biadillah à la Chambre des conseillers, a donc insisté pour intervenir. Mais Chabat l’a empêché d’intervenir et «l’a frappé avec un micro», selon des membres du PAM. Contacté par L’Economiste, le conseiller «agressé» est resté injoignable. Une chose est sûre, la police est intervenue en renfort et a fait évacuer la salle du complexe Liberté. Une enquête a aussitôt été diligentée. A l’heure où nous mettions sous presse, le PAM s’apprêtait à tenir une conférence de presse à Fès.

Amin RBOUB



«Un projet diabolique»

· Les professionnels du tourisme crient au scandale


· Ils promettent «d’aller jusqu'au bout» contre Chabat


«Diabolique». C’est par ce terme qu’un membre du Conseil régional du tourisme (CRT-Fès) a qualifié le dernier projet de Hamid Chabat relatif à la fermeture des bars. En effet, la réaction du CRT ne s’est pas faite attendre après que le maire istiqlalien ait annoncé que son conseil s’apprête à fermer les bars, bistrots, épiceries et tous les points de vente d’alcool. D’ailleurs, la décision a été votée par la majorité des élus (89 sur 96) hier, lors de la session ordinaire du Conseil communal.
La veille, les professionnels du tourisme s’étaient réunis dans l’urgence. Outre la diffusion d’un communiqué accusant le maire de «prendre des décisions à des fins purement politiques», ils menacent «d’aller jusqu’au bout pour protéger leur secteur». Normal puisque tous les touristes qui viennent à Fès ne le font pas seulement pour prier (ndlr: Chabat a comparé la capitale spirituelle aux Lieux Saints et notamment à La Mecque et Al Qods). Le CRT rappelle que la ville s’est engagée dans de grands projets d’investissement dans le cadre du Programme du développement régional du tourisme (PDRT). Lequel donne un intérêt particulier à l’animation.
Pour le CRT, la décision de fermer les bars n’appartient pas au Conseil de la ville. Ce sont les autorités locales, services de la police et plus particulièrement les renseignements généraux (RG) qui participent à l’attribution des licences de débits de boissons alcoolisées. Toutefois, la mairie pourrait s’appuyer sur le volet nuisances, sur l’hygiène, les heures d’ouverture... C’est le maire qui se porte garant de la santé des citoyens de sa ville.
Reste à signaler qu’à l’heure où nous mettions sous presse, le Conseil avait avalisé d’autres points à la majorité absolue: fermeture des lieux publics où l’on propose la chicha, les jeux de hasard. A proximité des sanctuaires de Sidi Ahmed Tijani, Moulay Idriss et Karaouiyine. L’autre texte sur les bars et boîtes de nuit n’est pas passé. A la place… on s’est battu.

J. R.
Source: www.leconomiste.com
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